En collaboration avec Elvira Pietrobon, architecte et urbaniste spécialisée en « Émergence écologique et développement urbain » à l’Université IUAV de Venise, nos apprenants ont pu participer en février dernier à un workshop sur le thème « Imaginer et construire ensemble la ville de demain » à Bamako, dans la zone autour du campus Kabakoo. Retour sur cette expérience !
Bamako n’a pas été un choix anodin pour ce workshop.
En effet, Bamako est la ville Africaine avec la plus forte croissance démographique. Du fait de cette expansion accélérée et du manque d’aménagements adaptés, la ville souffre de la pollution de l’eau et de l’air, de la congestion de la mobilité et de la disparition des espaces libres. Néanmoins, Bamako a également des particularités qui pourraient devenir la base de la construction de demain : l’agriculture urbaine, l’artisanat, les marchés décentralisés, ou encore l’élevage sont des pratiques existantes en ville qui mettent en valeur les savoir-faire et les produits locaux. Mettre en relation ces éléments avec l’innovation et l’urbanité pourrait résulter en une véritable ville durable, autonome et productive.
C’est donc sur cette base que le workshop propose de réfléchir autour de 3 problématiques principales : l’accès et le stockage de l’eau, l’accès au sol, et la végétalisation de la ville.
Le but est que nos apprenants puissent concevoir ponctuellement des projets répondant à des problématiques plus larges, dans l’idée de participer à construire la vision de la ville de demain.
Retours sur cette expérience très enrichissante à travers les mots d’un de nos apprenant·e·s, Modibo Sidibé :
« On a d'abord fait une comparaison entre ville et village, puis on a parlé de l'expansion rapide de la ville de Bamako et des problèmes qui en découlent. À travers une carte on a déterminé l'importance des marigots, à savoir que les marigots coulent vers les fleuves, qui coulent vers les mers et jusqu'à l'océan. On a remarqué que ces marigots traversent presque tous les quartiers de la ville. Donc après plusieurs descentes sur le terrain, on a recueilli beaucoup d'informations sur la problématique de ces marigots, notamment la pollution et le bouchage du lit du marigot par des constructions. Après on a eu à imaginer des solutions en groupe pour lutter contre ces problèmes. Une maquette fut créée en y intégrant toutes les solutions imaginées. »
Un autre apprenant, Diawara Boubou, nous livre ce que ce workshop lui a apporté :
« Il m'a permis de connaître les problématiques au sein de mon environnement et leur causalité. J'ai retenu qu'on ne peut pas résoudre un problème sans faire des recherches sur ce qui a causé ce problème. »
On comprend alors que pour bien mesurer les enjeux d’un environnement, il est indispensable de s’y déplacer et de faire ses propres recherches. Nos apprenants ont pu se rendre compte de cela en discutant avec les habitants des ces zones, tout autour des marigots, notamment à travers le témoignage d’une riveraine :
"C’est le ruissellement des eaux de pluie qui provoque la crue de ce marigot. Chaque année, il y a une inondation, mais celle de cette année fut désastreuse. Toutes les habitations aux alentours furent inondées, causant morts et destructions de biens. Vous avez observé les dégâts à la télé mais vous ne saurez point la réalité sans venir sur le terrain. Donc vos déplacements sont salutaires."
Les problèmes de pollution dans les marigots sont terribles, et en demandant comment nous pourrions aider, la réponse des habitant·e·s était claire :
« En dégageant et en nettoyant le lit du marigot. C'est souvent quelques personnes qui prennent l'initiative. Actuellement je considère plus le ramasseur d'ordures ambulant que certaines autorités même, parce qu'il nous débarrasse de nos ordures. Ces ramasseurs d'ordures ne sont pas considérés mais ils sont très importants pour notre société. »
Ainsi délaissés, ces endroits sont pourtant de véritables lieux de vie, où la population se retrouve, comme en témoigne l’animatrice de workshop, Elvira Pietrobon :
« Il y a des bandes de jeunes là-bas pour se reposer et discuter après l’école, des enfants qui jouent, des personnes qui peignent et bien sûr les travailleurs, les maraîchers, dont les habitants se plaignent. C’est un espace communautaire où vit réellement la population. »
Ces lieux existent et font parti de la ville. Grâce à ces visites, les apprenant·e·s ont vraiment pu visualiser et connaître ces endroits, dont beaucoup d’entre eux ignoraient même l’existence. Ce sont des lieux à fort potentiels, mais également très difficiles à aménager, il était donc plus question d’utopie pendant le workshop, le but étant vraiment de faire rentrer ces espaces dans l’imaginaire avant de chercher forcément des solutions.
Cependant, plusieurs solutions très intéressantes ont tout de même émergé, notamment sur l’aménagement des marigots. Les apprenants ont d’abord travaillé en groupe sur des solutions différentes, puis ils ont spontanément décidé de tout mettre en commun pour travailler ensemble sur une même maquette. Cette initiative a été grandement appréciée par Elvira Pietrobon, qui insiste qu’elle a elle-même appris des apprenant·e·s à travers leur méthode de travail.
Et c’est tout l’effet Kabakoo. Nous estimons tous être des apprenant·e·s, tout au long de notre vie, et nous avons énormément de choses à apprendre les un·e·s des autres. Ce workshop a été très enrichissant pour toutes les parties prenantes, et nous remercions encore Elvira Pietrobon de l’avoir animé.
#OnFaitEnsemble #HighLowTech